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Dernières notes de lecture et archives >>> |
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Gilles LEBRETON
Libertés publiques et
droits de l’Homme
Paris, Armand Colin, 2003, 538 p., coll. U.
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Slobodan PEROVIC
Déclaration des droits
naturels de l’Homme
Belgrade, Editions de l’Ecole de droit naturel de Kopaonik, 2003,
422 p.
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Christoph
EBERHARD
Droits de l’Homme et
dialogue interculturel
Paris, Editions des Ecrivains, 2002, 399 p.
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Nejib BOUZIRI
La protection des
droits civils et politiques par l’ONU. L’œuvre du Comité des droits
de l’Homme
Paris, L’Harmattan, 2003, 604 p.
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Christof HEYNS
et Frans VILJOEN
The impact of the United Nations
Human Rights Treaties on the domestic level
La Haye, Kluwer Law
International, 2002, VIII-268 p.
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Centre for Human Rights (University of Pretoria)
International Yearbook of
regional Human Rights Master’s Programmes-2001
Pretoria, Centre for Human Rights/University of Pretoria, s.d., 437
p.
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Véronique HAROUEL
Genève-Paris (1863-1918). Le
droit humanitaire en construction
Genève : Société Henry Dunant-Comité international
de la Croix-Rouge/Croix-Rouge française, 2003, XII-817 p.
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Ana PEYRO-LLOPIS
La compétence universelle en
matière de crimes contre l'humanité
Bruylant, Bruxelles, 2002, VI-178 p, collection du
CREDHO n° 3.
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Knut DÖRMANN
(avec les contributions de Louise Doswald-Beck et Robert Kolb)
Elements of war crimes under
the Rome Statute of the International Criminal Court. Sources and
commentary
Cambridge : Cambridge University Press, 2003, LX-524 p.
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Birgit
KESSLER
Die Durchsetzung der Genfer
Abkommen von 1949 in nicht-internationale bewaffneten Konflikten auf
Grundlage ihres Gemeinsamen art. 1
Berlin,
Duncker & Humblot, 2001, 281 p.
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Gilles
LEBRETON
Libertés
publiques et droits de l’Homme
Paris, Armand Colin, 2003, 538 p., coll. U. |
Avec cette sixième
édition, le manuel du Doyen Lebreton peut être considéré comme un
“ classique ”. Classique, l’ouvrage l’est par son plan (Théorie
générale / Régime juridique des principales libertés publiques), son
contenu (fine analyse juridique, mais aussi vastes connaissances de
la philosophie politique) et son style clair, précis et rigoureux.
Classique, l’auteur l’est par l’étendue de sa culture de grand
humaniste (on appréciera, entre autres, sa critique de la Cour
européenne des droits de l’Homme qui dans son arrêt Refah Partisi
adopte “ une vision caricaturale de l’islam en estimant que
cette religion est nécessairement vouée à l’intégrisme ”, p.120 note
1) et par son républicanisme parfois ombrageux (la pensée de Carl
Schmitt ne peut être réduite à celle du théoricien officiel du
nazisme qu’au demeurant il ne fut pas). Toutefois, s’il est engagé,
le Doyen Lebreton n’est pas pour autant partisan. Adepte du
positivisme sociologique, l’auteur évite autant la métaphysique
jusnaturaliste que le juridisme désincarné, pour donner une vision
vivante, personnelle et roborative des libertés fondamentales.
Philippe Ch.-A.
Guillot
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Slobodan
PEROVIC
Déclaration des
droits naturels de l’Homme
Belgrade, Editions
de l’Ecole de droit naturel de Kopaonik, 2003, 422 p. |
Ce livre du
président de l’Alliance des associations de juristes de Serbie et du
Monténégro reproduit en plusieurs langues (anglais, français,
allemand, espagnol, russe et chinois) une synthèse de quinze ans
d’activités de l’Ecole de droit naturel de Kopaonik (le Kopaonik est
un massif montagneux à la frontière historique de la culture
occidentale et de la culture orientale, situé à 250 kilomètres au
sud de Belgrade ; chaque année l’Ecole regroupe à la mi-décembre
“ deux à trois mille juristes de diverses régions du monde ”) sous
forme d’une déclaration en 32 articles, adoptée le 16 décembre 2002
à la séance de clôture de l’Ecole. La version française comprend 66
pages.
Le préambule place
cette déclaration sous l’égide de “ la conception rationnelle de
la pluralité de la philosophie générale du droit naturel, selon
laquelle la source du droit réside dans la légitimité de la
spiritualité commune et non pas dans l’arbitraire ou l’instinct
sensuel, ce qui la rend apte à consacrer, par l’idée absolue du
droit, la justice naturelle et sociale universelle, et à instaurer
de la sorte le droit universel, supranational et juste ” (p.76)
et possède un indéniable souffle kantien.
Le dispositif de la
Déclaration s’ouvre sur des “ dispositions générales ” (pp.81-95)
qui relèvent plus de l’exposé des motifs, voire d’un cours de
philosophie du droit (Platon, Aristote, St Thomas d’Aquin, Grotius,
Hobbes, Pufendorf, Descartes, Christian Thomasius, Herbert Spencer,
Henri Ahrens et, bien sûr, Emmanuel Kant y sont évoqués), que d’un
catalogue de règles applicables. D’une manière générale, le style
de la Déclaration s’apparente plus à une leçon universitaire qu’à
une véritable déclaration de principes.
L’inventaire des
droits tenus pour naturels par l’Ecole est des plus classiques :
droit à la vie, droit à la liberté, droit à la propriété, droit à
l’œuvre intellectuelle, droit à la justice, et droit à l’Etat de
droit. De prime abord, on peut même s’étonner de ne pas y trouver
de droit de la deuxième ou de la troisième génération des droits de
l’Homme, mais ceux-ci sont inclus dans les définitions de ces six
droits qui forment l’hexagone fondamental du droit naturel (la
devise de l’Ecole est : vita, libertas, proprietas, humanitas,
justicia, jus – ce qui signifierait donc que l’humanité s’épuise
dans l’œuvre intellectuelle).
Ainsi, le droit à la
vie contient non seulement le droit à la santé, mais fait également
mention de “ l’écologie ” (“ 16.1 Tout homme a droit à une vie
saine et productive en cohérence avec la nature. (...) 16.2 Les
objectifs écologiques et économiques doivent être reliés par le
“ capital social ”, l’ordre juridique et moral et la détermination
des hommes à promouvoir, par leur travail commun, le développement
général de leur environnement, tout en satisfaisant aux exigences
d’un environnement sain pour les générations présentes et à venir.
(…) ”, p.101) et le droit à la propriété contient le droit au
travail (“ 27.1 Le droit au travail et aux résultats du travail
appartient à chaque homme (…), p.127 ; “ 27.4 … toute
personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des
conditions équitables et satisfaisantes de travail, et à la
protection contre le chômage.(…) ”, p.128).
Sans doute aussi le
douteux privilège d’avoir connu le socialisme réel qui mettait en
avant les droits-créances pour mieux étouffer les droits-libertés
n’est-il pas étranger à ce texte plus libéral que bien des textes
occidentaux (“ 20.3… l’administration publique doit reposer sur
les principes de la culture démocratique et être dotée d’un
mécanisme de contrôle social. Elle doit être libérée des entraves
de la bureaucratie, de la corruption et du dogmatisme des partis
politiques. ”, pp.110-111 ; “ 22.1 Le type collectiviste de
propriété mis en place dans les pays socialistes au moyen de la
transformation forcée de la propriété privée en propriété d’Etat
(nationalisation), n’a pas prouvé sa justification économique. Dans
la plupart de ces pays, on assiste actuellement au processus de
dénationalisation qui rend les biens nationalisés à leurs anciens
propriétaires par restitution en nature ou indemnisation en
espèces. Ce processus est conforme aux principes de la justice
sociale. ”, p.117 ; “ 32.3… Dès lors que la politique
dégénère en arbitraire et en aliénation, dès qu’elle est imposée par
la force et le diktat au droit et à l’ordre juridique, celui-ci perd
sa légitimité. On pénètre alors dans les espaces de l’opportunité
politique où domine soit la conscience révolutionnaire soit la
servilité politique. C’est le commencement de l’agonie du droit et
l’avènement de l’Etat d’antidroit. ”, p.139).
En revanche, il est
étonnant de trouver dans une telle déclaration un article consacré
au contrat et à la responsabilité civile (“ 24.2 La liberté
contractuelle ne se ramène pas à la question de la négation ou de
l’effet absolu de la liberté, mais à celle de la détermination de la
mesure permettant de conférer, dans la dualité des exigences, la
place voulue à l’une et l’autre nécessité sociale : celle d’assurer
la liberté de l’activité individuelle, et celle de garantir
l’indispensable protection des biens publics de la communauté ”,
p.120), aux sociétés et aux contrats commerciaux ou… aux
assurances !
Le lecteur
positiviste ne peut que noter que cette Déclaration des droits
naturels n’apporte guère de réponse aux grandes questions
philosophiques que le positivisme est réputé ne pas savoir résoudre
puisqu’elle est plus que précautionneuse dans la portée du droit à
la vie… renvoyant au droit positif national le soin de trancher (“ 14.18
La vie de l’homme jouit de la protection depuis la naissance jusqu’à
la mort étant entendu que cette protection s’étend aussi à la
période prénatale. L’enfant conçu mais non encore né est
juridiquement protégé à partir du moment où le fœtus est viable.
Cette protection qui se réalise, pour l’essentiel, au moyen de
prescriptions légales régissant l’interruption de la grossesse, va
de la libération à l’interdiction. ”, p.99 ; les articles 14.21
et 14.22 ne prennent pas plus partie sur la question de
l’euthanasie).
En définitive, plus
qu’un texte à vocation opératoire, cette Déclaration résume la
conception idéaliste et idéalisée que tendent à se faire du droit
ceux qui ont trop longtemps vécu sous le règne du matérialisme
historique et de l’antidroit. L’indéniable valeur sociologique de
cette Déclaration atteste, au grand dam des altermondialistes, de la
pénétration et de l’enracinement des idées libérales en Europe
centrale et orientale.
Philippe Ch.-A.
Guillot
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Christoph
EBERHARD
Droits de l’Homme
et dialogue interculturel
Paris, Editions des
Ecrivains, 2002, 399 p. |
Le nouvel ouvrage de
Christoph Eberhard intitulé « Droit de l’Homme et dialogue
interculturel » porte le regard d’un anthropologue du droit sur un
débat qui agite la communauté internationale depuis de nombreuses
années et qui n’est pas terminé, loin s’en faut. Cette orientation
anthropologique est attestée par la bibliographie qui fait une large
place à l’école française et francophone de l’anthropologie
juridique (Michel Alliot, Etienne Le Roy, Norbert Rouland, Jacques
Vanderlinden). Malheureusement, ce livre, dont le titre accrocheur
est aisément compréhensible au commun des mortels, présente et
développe un discours ésotérique qui rebutera le juriste ordinaire,
le praticien du droit et le défenseur des droits de l’Homme, le
simple citoyen ou le militant de base. Ce discours, réservé à des
initiés leur paraîtra déconnecté de la réalité du fait de son degré
élevé de généralité et de son abstraction. On peut craindre que les
présupposés qui sous-tendent ces analyses et l’ambiguïté de
celles-ci ne clarifient pas les données du combat pour une véritable
universalité des droits de l’Homme qui tienne compte et intègre la
diversité des cultures (voir à titre d’exemple, Paul Tavernier,
« L’ONU et l’affirmation de l’universalité des droits de l’Homme »,
Revue trimestrielle des droits de l’Homme, n° 31, 1997, pp.
379-393).
Si l’anthropologie
juridique se réfère souvent à l’Afrique, comme l’évoque l’arbre à
palabre figurant sur la couverture, Christoph Eberhard succombe pour
sa part au mirage de l’Orient et au mythe d’une sagesse orientale de
pacotille…
Paul Tavernier
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Nejib BOUZIRI
La protection des droits civils et politiques par l’ONU.
L’œuvre du Comité des droits de l’Homme
Paris, L’Harmattan, 2003, 604 p. |
L’ouvrage que publie
Nejib Bouziri n’est pas un ouvrage ordinaire. Bien qu’issu d’une
thèse de doctorat soutenue en 1994 à l’Université de Paris II, sous
la direction du Doyen Mario Bettati et qui portait sur « Le Pacte
international relatif aux droits civils et politiques (élaboration
application) », il se présente fort différemment. Si l’on retrouve
l’essentiel de la substance de la thèse, celle-ci a été
considérablement mise à jour et enrichie, bien que certains
développements aient été allégés (notamment les développements
historiques). C’est donc un tableau beaucoup plus complet qui est
présenté en ce qui concerne le contrôle exercé par le Comité des
droits de l’Homme en vertu de l’article 40 du Pacte relatif aux
droits civils et politiques, sur la base des rapports périodiques
fournis par les Etats, mais aussi pour ce qui est du contrôle
contentieux exercé par le Comité en vertu du protocole facultatif et
concernant les communications individuelles.
Ce qui caractérise
le livre de Nejib Bouziri, c’est qu’il s’agit d’une œuvre très
personnelle reflétant l’expérience et les préoccupations de
l’auteur. Celui-ci a eu une longue expérience diplomatique comme
ambassadeur de Tunisie dans de nombreux pays, à l’époque difficile
de la guerre froide, et comme représentant de son pays aux Nations
Unies, à l’Assemblée générale ou dans certaines grandes conférences,
ainsi que devant la Cour internationale de Justice. Mais surtout sa
participation aux travaux du Comité des droits de l’Homme de 1978 à
1986 lui a permis de connaître le fonctionnement de cet organisme de
l’intérieur. Cela donne à de nombreux développements une résonance
très particulière. L’ambassadeur Bouziri n’hésite pas à dévoiler
certains aspects peu connus des travaux du Comité, voire certains
dysfonctionnements. Il prend position sur les questions
controversées. Il n’élude pas les problèmes et il se prononce pour
une plus grande transparence des travaux du Comité : même si des
progrès ont été faits en ce qui concerne les communications
individuelles, la transparence n’existe pas pour les observations
finales du Comité à l’issue de l’examen du rapport d’un Etat partie
(pp. 577-578).
Comme le remarque
fort justement dans sa préface Fausto Pocar, qui fut président du
Comité des droits dd l’Homme, « la partie de l’ouvrage où la finesse
de juriste ainsi que la sensibilité politique de M. Bouziri
ressortent de la manière la plus évidente, c’est là où il soumet à
une analyse rigoureuse les dispositions matérielles du Pacte qui
énoncent les droits protégés » (p. 7). Cette partie a pris une
ampleur considérable par rapport à la thèse. On fait volontiers
sienne l’affirmation de l’ambassadeur Bouziri selon laquelle le
droit à la vie constitue le « droit suprême sans lequel les autres
droits n’ont pas de sens » (p. 268). On constatera également qu’un
sujet lui tient particulièrement à cœur, c’est celui de
l’émancipation des femmes, comme le relève son préfacier, et comme
cela apparaît par la citation de René Dumont placée en exergue
(« Sans l’émancipation des femmes, il n’y aura pas de vraie
démocratie ») puis dans les développements consacrés à l’article 3
du Pacte et à l’égalité des hommes et des femmes (pp. 183-208).
On ne peut
qu’admirer la persévérance, la ténacité et le courage de l’auteur.
Celui-ci après avoir abandonné un projet de thèse qu’il venait
d’entreprendre, afin de servir son pays qui accédait à
l’indépendance, a décidé une fois à la retraite, de reprendre le
chemin de l’Université et de se soumettre à ses exigences et à ses
contraintes. Finalement, après encore plusieurs années de labeur, il
nous livre le fruit de ses réflexions dans un livre stimulant et
très riche sur l’œuvre encore insuffisamment connue, en dehors du
cercle des spécialistes, d’un Comité des Nations Unies qui constitue
pourtant le prototype d’une « famille » d’organes assurant le
contrôle de plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits
de l’Homme. Le Comité a servi de modèle non seulement dans le cadre
des Nations Unies, mais aussi dans le cadre régional, certains
organismes s’étant inspirés de cet exemple, comme la Commission
africaine des droits de l’Homme et des peuples. C’est finalement à
une lecture de l’œuvre du Comité, à la fois humaine et politique, au
sens plein du terme, que Nejib Bouziri nous invite et on se laisse
volontiers entraîner à sa suite.
Paul Tavernier
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Christof
HEYNS et Frans VILJOEN
The impact of the United Nations Human Rights Treaties on the
domestic level
La Haye, Kluwer Law
International, 2002, VIII-268 p. |
Cette étude sur
l’impact des traités des Nations Unies relatifs aux droits de
l’Homme au niveau national constitue le résultat d’un travail de
recherche considérable. Les professeurs Heyns et Viljoen ont mené
une enquête systématique et approfondie sur l’influence réelle des
six instruments principaux adoptés par l’Organisation mondiale en
matière des droits de l’Homme : les deux pactes internationaux de
1966 (le pacte relatif aux droits civils et politiques, y compris le
protocole facultatif), et le pacte relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels), la convention sur l’élimination de toutes les
formes de discrimination raciale (1965), la convention sur
l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des
femmes (1979), la convention contre la torture (1984) et la
convention relative aux droits de l’enfant (1989). Un échantillon de
vingt pays, soit quatre pour chacune des cinq régions reconnues par
l’ONU, a été retenu pour effectuer la recherche : Afrique, Asie,
Europe orientale, Amérique latine et Caraïbes, Europe occidentale et
autres pays. Certes, on peut critiquer le choix de cette répartition
géographique qui reste un héritage de l’époque de la guerre froide.
En effet, cela aboutit à une sur-représentation de l’Europe (6 pays)
et à une sous-représentation de l’Afrique (4 pays) au profit de
l’Europe de l’Est et du Nord et au détriment de l’Europe du Sud.
Mais cela n’est guère important. Les vingt pays couverts grâce à une
équipe de correspondants, font l’objet de rapports séparés, et tous
construits sur le même schéma, ce qui permet des comparaisons : ils
occupent la majeure partie de l’ouvrage (pp. 47-648). Chaque rapport
national donne des informations très précises et très précieuses sur
le contexte général et le système juridique du pays ; sur l’état des
ratifications des instruments onusiens et sur le processus de
ratification et d’acceptation ; sur l’impact de chacun des
instruments sur le droit interne, sur le processus d’examen des
rapports nationaux soumis aux comités onusiens, sur les
communications individuelles, avec en conclusion, une évaluation
générale.
La synthèse de ces
rapports extrêmement fouillés est présentée par les deux
responsables de la publication dans un résumé substantiel des
résultats de la recherche figurant en tête de l’ouvrage (pp. 1-46).
Les professeurs Heyns et Viljoen exposent en détail la méthode
suivie et mesurent l’impact des six instruments onusiens dans
l’ensemble des pays étudiés. Ils ne cachent pas les difficultés que
ces instruments rencontrent pour imprégner toute la vie de la nation
et ils formulent quelques propositions pour améliorer l’influence
des ces traités dans ces pays et dans les autres.
On ne peut qu’être
impressionné par l’ampleur de l’investigation et par la somme des
informations fournies. Il ne s’agit certes pas d’une œuvre
doctrinale, mais d’un ouvrage pratique qui devrait rendre les plus
grands services pour les chercheurs universitaires qui voudront
approfondir certains sujets, mais aussi pour les praticiens du droit
qui y trouveront des réponses aux questions qu’ils se posent, et
pour les militants des droits de l’Homme qui découvriront des
éléments pour développer leur action.
Paul Tavernier
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Centre for Human Rights (University of
Pretoria)
International Yearbook of regional Human Rights Master’s
Programmes-2001
Pretoria, Centre for Human Rights/University of Pretoria, s.d., 437
p.
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Cet Annuaire
international des programmes de mastères régionaux sur les droits de
l’Homme, publié par le Centre des droits de l’Homme de Pretoria
dirigé par le professeur Christof Heyns, contient une description
des programmes (pp. 2-13) et surtout une sélection de huit articles
choisis parmi les travaux élaborés au sein de chacun des quatre
programmes participants, à raison de deux articles par programme.
Les quatre programmes se sont tenus à Venise pour l’Europe, à
Pretoria pour l’Afrique, à Sarajevo pour l’Europe orientale et à
Malte pour les pays méditerranéens. Les thèmes abordés dans les
articles concernent des sujets très variés, notamment le discours de
haine en Afrique (Lirette Louw, « Hate speech in Africa : « Formulating
an appropriate legal response for a racial and ethnically divided
continent with specific reference to South Africa and Rwanda »
(pp. 157-193) et l’égalité raciale en Europe (Olivera Kuketic, « The
role of specialised bodies in the context of the new EU racial
equality directive », pp. 14-98). Les droits des femmes sont
étudiés à travers l’expérience post-communiste en Albanie (Ermelina
Balla, « Women’s rights in Albania during the post-communist
transition », pp. 240-285), alors que l’égalité des droits et
des chances pour les hommes et les femmes est présentée à travers le
droit de l’Union européenne (Michael Michalakis, « Equal rights
and opportunities for men and women under European Union law » ,
pp. 336-397. Cet exposé trouve son prolongement et son élargissement
dans une contribution consacrée à la discrimination positive (Berbel
Vrancken, « Reviewing affirmative action : a comparative study of
the conditions applied by the European Court of Justice and other
legal systems », pp. 99-156. Par ailleurs, deux droits
spécifiques, le droit à la santé à travers le prisme de l’accord
Trips de l’OMC, et le droit à la vie, sous l’angle de la peine de
mort, font l’objet d’exposés circonstanciés (Sisule Frederick
Musungu, « The right to health in the global economy : reading
human rights obligations into the patent regime of the WTO-TRIPS
agreement », pp. 194-239 et Rym Ben Slama, « The death
penalty as an exception to the right to life : to what extent is
capital punishment a violation of human rights ? », pp.
398-433). Enfin, un article concernant le rôle des élites,
politiques et militaires, dans la dissolution de la RSF de
Yougoslavie semble s’écarter des questions abordées dans les autres
contributions, même si les thèmes de l’ethnicité et des violations
des droits de l’Homme sont évoqués (Ivan Barbalic, « The role of
elites in the disintegration of the Socialist Federal Republic of
Yugoslavia », pp. 287-335.
L’Annuaire réunit
des études émanant de jeunes juristes ; elles sont sérieuses et bien
documentées comme en témoigne les notes de bas de pages et les
bibliographies figurant en annexe. Elles témoignent aussi du souci
de présenter certains débats et controverses les plus actuels en
matière de protection des droits de l’Homme. Il est dommage que les
éditeurs n’aient pas essayé de donner une plus grande cohérence à
l’ensemble, alors même que certaines lignes de force apparaissent
clairement, ainsi qu’on a pu le constater.
Paul Tavernier
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Véronique HAROUEL
Genève-Paris (1863-1918). Le droit humanitaire en construction
Genève : Société Henry Dunant-Comité international de la
Croix-Rouge/Croix-Rouge française, 2003, XII-817 p. |
C’est un bel ouvrage
que nous offre Véronique Harouel sur l’histoire de la naissance du
droit international humanitaire contemporain sous l’angle des
relations entre la France et le CICR durant une période décisive qui
s’étale sur plus de cinquante ans. C’est aussi le fruit d’un travail
de recherche exceptionnel dans les archives, tant à Paris et Nantes
qu’à Genève et Berne, qui a donné lieu à une thèse de doctorat
soutenue à l’Université de Poitiers en 1996 sous le titre « L’essor
du Comité international de la Croix-Rouge et la France
(1863-1918) ». Le sujet présente un grand intérêt car il part de la
création du CICR jusqu’à la fin du premier conflit mondial. Si la
France a favorisé l’établissement du Comité international et la
révision de la première Convention de Genève qui sera réalisée en
1906 avec la participation active de Louis Renault, elle n’a pas
toujours respecté les principes du droit humanitaire lors des deux
conflits majeurs intervenus durant cette période, surtout lors de la
guerre de 1870, mais aussi au cours de la guerre de 1914-1918. En
effet, même si « la France et ses alliés ont entendu faire la
‘guerre du droit’ », cela ne l’a pas empêchée de faire « primer ses
intérêts stratégiques sur les principes d’humanité prônés par
Genève » (p. 785).
L’histoire des
relations entre Paris et Genève telle que nous la restitue Véronique
Harouel est une histoire compliquée mais passionnante. Il faut
prendre le temps de suivre les méandres des difficultés, des
affrontements, mais aussi des convergences et des soutiens mutuels
pour le progrès de l’idée humanitaire. On ne peut qu’admirer
l’érudition de l’auteur en même temps que la clarté de l’exposé. Le
récit est toujours étayé par un appareil scientifique irréprochable,
mais reste très vivant et se lit aisément. L’auteur maîtrise
parfaitement son sujet : elle avait déjà eu l’occasion d’en faire la
preuve, dans un registre très différent, en publiant une brève « Histoire
de la Croix-rouge » dans la collection Que sais-je ? en
1999, complétée, dans la même collection, par un recueil des « Grands
textes du droit humanitaire » paru en 2001. La contribution de
l’historien, surtout lorsqu’elle présente cette qualité, est
essentielle au juriste aux prises avec les difficultés actuelles de
mise en œuvre du droit humanitaire, qu’il s’agisse du praticien ou
de l’universitaire. Elle l’est aussi pour les acteurs,
gouvernementaux ou non gouvernementaux de cette mise en œuvre. On ne
peut que souhaiter que les Etats et le CICR ouvrent largement leurs
archives aux chercheurs pour qu’ils explorent sans complaisance
l’histoire des conflits armés et de l’application du droit
humanitaire.
Paul Tavernier
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Ana PEYRO-LLOPIS
La compétence universelle en matière de crimes
contre l'humanité
Bruylant, Bruxelles, 2002, VI-178 p, collection du CREDHO n° 3. |
L’arrestation, le 16 octobre 1998, de l’ancien
dictateur chilien Augusto Pinochet, à Londres, devait constituer le
point de départ de réflexions sur la compétence universelle des
juridictions internes à l’égard de certains crimes de droit
international, comme en atteste le présent ouvrage issu d’un mémoire
de DEA. S’inspirant de cette actualité, l’auteur a choisi de centrer
son étude sur l’examen de la compétence universelle à l’égard des
crimes contre l'humanité « innomés » (p. 4) et du crime de génocide.
Si les crimes contre l'humanité ne font pas l’objet d’une convention
internationale spécifique et que leur répression repose ainsi sur
des bases coutumières, le crime de génocide est en revanche régi par
la Convention pour la prévention et la répression du crime de
génocide du 9 décembre 1948 qui ne mentionne cependant que le
principe de la compétence territoriale des juridictions de l’Etat
sur le territoire duquel le crime a été commis et ne fait aucunement
mention de la compétence universelle. C’est cette toile de fond qui
a naturellement conduit Ana Peyro-Llopis à s’interroger sur
l’existence en droit international coutumier d’une compétence
universelle des tribunaux nationaux à l’égard des crimes contre
l'humanité envisagés de manière générale. Pour déterminer
l’existence, voire la simple émergence, d’une coutume en la matière,
l’ouvrage est divisé en deux parties, correspondant à
l’identification respective des deux éléments nécessaires à la
cristallisation d’une norme coutumière, l’opinio juris et la
pratique des Etats.
La première partie de l’ouvrage a ainsi trait à la
recherche de précédents sur la compétence universelle en matière de
crimes contre l'humanité au niveau international. L’auteur procède à
une analyse du corpus normatif conventionnel existant (Convention
sur le génocide de 1948, Convention sur l’élimination et la
répression du crime d’apartheid de 1973, Convention
contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants de 1984 et autres conventions de portée générale) et à
un examen des travaux des instances internationales (jurisprudence
internationale, travaux accomplis au sein des Nations Unies et ceux
de la Commission du droit international) qui se réfèrent de manière
plus ou moins directe à la compétence universelle.
La seconde partie de l’ouvrage s’attache ensuite à
répertorier la pratique des Etats concernant l’utilisation de la
compétence universelle en matière de crimes contre l'humanité. Au
terme de l’analyse d’une sélection de législations nationales
établissant une compétence universelle à l’égard des crimes contre
l'humanité et de leur mise en œuvre par le juge interne, cette
partie se fait en définitive l’écho des obstacles auxquels se heurte
la mise en œuvre effective de la compétence universelle à l’encontre
des auteurs de crimes contre l'humanité, qu’il s’agisse de la
méfiance traditionnelle du juge interne à l’égard de l’application
d’une règle coutumière, en l’absence de support conventionnel ou
encore des défaillances des ordres juridiques internes au premier
rang desquelles figure souvent l’absence d’intégration dans la
législation nationale de l’incrimination de crime contre l'humanité.
Au regard des précédents examinés et au-delà de
certaines initiatives législatives et jurisprudentielles qui
s’avèrent ponctuelles et limitées, c’est à une conclusion empreinte
de mesure et de prudence, mais non dénuée de réalisme juridique, que
nous invite Ana Peyro-Llopis. Force est en effet de constater qu’en
l’état actuel des choses, il n’existe pas de coutume internationale
reconnaissant une compétence universelle des tribunaux nationaux en
matière de crimes contre l'humanité « innomés » (p. 127). Cette
assertion se trouve pour autant immédiatement assortie de certaines
nuances de la part de l’auteur qui précise qu’il importe de
distinguer entre la compétence universelle en matière de génocide à
l’égard duquel les contours d’une règle coutumière se font
progressivement jour « même si la pratique des Etats est encore trop
disparate pour pouvoir parler d’une règle de droit consolidée » (p.
128) et la compétence universelle en matière de crimes contre
l'humanité « innomés » dont les contours demeurent contestés. De
lege ferenda, l’auteur préconise la reconnaissance d’une
compétence universelle facultative en matière de crimes contre
l'humanité dès lors que « l’Etat du locus delicti commissi ou
celui dont le présumé responsable du crime est ressortissant ne
demande pas son extradition » (p. 129).
On ne peut que souligner l’utilité de cet ouvrage
qui, sans occulter les zones d’ombre et les déficiences entourant le
mécanisme de la compétence universelle, rend compte de l’état actuel
du droit positif existant en la matière, ne cédant nullement à la
tentation d’une vision idyllique à laquelle un certain angélisme
juridique conduit quelquefois et à laquelle le sujet pouvait
aisément se prêter. L’auteur a su s’écarter de cet écueil en
distinguant de manière rigoureuse la lex lata de la lex
ferenda. Ana Peyro-Llopis pose ainsi les jalons d’une réflexion
stimulante qui ne manquera certainement pas de servir de base à de
nouveaux débats au regard des flux et reflux actuels de la difficile
mise en œuvre de la compétence universelle.
L’ouvrage est complété par d’utiles annexes
reproduisant les extraits pertinents de certaines législations
(Belgique, Canada, Espagne, Etats-Unis, France) et jurisprudences
nationales (Belgique, Canada, Espagne, Etats-Unis) relatives à la
compétence universelle qui ont servi de support à l’élaboration de
la réflexion.
Isabelle Moulier
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Knut DÖRMANN (avec les
contributions de Louise Doswald-Beck et Robert Kolb)
Elements of war crimes under the Rome Statute of the International
Criminal Court. Sources and commentary
Cambridge : Cambridge University Press, 2003, LX-524 p. |
Cet ouvrage est le
fruit d’un travail exemplaire et vient à son heure au moment où la
Cour pénale internationale se met en place et va commencer à traiter
ses premières affaires. L’auteur a une expérience personnelle et une
connaissance intime des questions traitées, du fait de sa
participation, pour le compte du CICR, aux discussions qui ont
permis l’élaboration des « éléments des crimes ». La préface de
Philippe Kirsch, dont on connaît le rôle éminent qu’il a joué,
résume de manière remarquable l’intérêt et l’originalité de ces
« éléments des crimes ». Bien que l’objet de la recherche soit
limité à l’étude des crimes énumérés à l’article 8 § 2 du Statut de
Rome et ne prenne pas en compte la question de la responsabilité du
supérieur hiérarchique (article 28 du Statut) ou celle de
l’incitation et des formes d’assistance à la commission des crimes
(article 25), ce commentaire crime par crime, construit de manière
très systématique et réalisé avec beaucoup de minutie, est destiné à
devenir un grand classique et un instrument indispensable pour les
praticiens (diplomates, juges, militants des ONG) et pour la
doctrine (chercheurs et universitaires). Ceux-ci y trouveront des
éléments très précis concernant les travaux préparatoires et la
« base juridique » de chaque crime, autrement dit les textes
antérieurs et la jurisprudence (Nuremberg et tribunaux
internationaux). Celle-ci est présentée de manière très complète et
pratiquement exhaustive.
Certes l’exercice
entrepris par Knut Dörmann comportait des limites. En tant que
commentaire « crime par crime », il se situe dans la tradition des
grands commentaires publiés par le CICR pour les quatre Conventions
de Genève de 1949 et pour les deux Protocoles de 1977. L’approche
des questions est parcellaire et les vues d’ensemble restent assez
restreintes, malgré certains éléments que l’on peut trouver dans
l’introduction. Celle-ci est assez brève et aurait mérité des
développements plus amples (7 pages seulement). Le problème
essentiel de la valeur juridique des éléments des crimes n’occupe
qu’une page ! Il ne s’agit pourtant pas d’un problème purement
doctrinal et la Cour pénale internationale sera sans doute amenée à
se pencher là-dessus. Il manque aussi une conclusion générale, qui
aurait pu rassembler quelques éléments de manière synthétique.
Toutefois l’ouvrage,
tel qu’il est présenté, mérite les plus grands éloges pour les
services qu’il rendra et pour son appareil scientifique de très
grande qualité. On trouve, en tête, des tables de jurisprudence très
bien faites (par ordre alphabétique et par juridiction), une table
des traités et autres instruments internationaux et une liste
d’abréviations et de sigles. A la fin de l’ouvrage on pourra
consulter le document préparé par le CICR sur l’élément
psychologique des crimes (mens rea), un index détaillé et une
bibliographie, malheureusement essentiellement anglophone et parfois
un peu ancienne. L’ouvrage classique de Charles Rousseau (1983) ne
reflète plus l’état du droit actuel et on peut regretter que la
« jeune » doctrine française, pourtant fort dynamique, ne soit pas
mentionnée. Ces imperfections pourraient être corrigées si l’ouvrage
connaissait ultérieurement une version française, voire des éditions
en espagnol et en arabe. En effet, la diversité des langues est un
élément essentiel de la diversité culturelle et le gage d’une
véritable universalité, si nécessaire en matière de droits de
l’Homme et de droit international humanitaire.
Paul
Tavernier
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Birgit
KESSLER
Die Durchsetzung der Genfer Abkommen von 1949 in
nicht-internationale bewaffneten Konflikten auf Grundlage ihres
Gemeinsamen art. 1
Berlin, Duncker & Humblot, 2001, 281 p.
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L’article 1er commun
aux quatre Conventions de Genève de 1949 a déjà donné lieu à
plusieurs études à la suite de l’article désormais classique de
Luigi Condorelli et Laurence Boisson de Chazournes paru dans les
Mélanges Pictet en 1984 et mis à jour dans la Revue
internationale de la Croix-Rouge en 2000. Les plus grands
spécialistes de droit humanitaire ont abordé la question (voir par
exemple l’article de Frits Kalshoven au Yearbook of International
Humanitarian Law, 1999, p. 3 et s.). Il fallait donc un certain
courage pour reprendre la question. Birgit Kessler n’a pas hésité à
le faire dans sa thèse de doctorat soutenue en 2000 à l’Université
de Kiel, et elle a eu le mérite de concentrer son attention sur le
problème particulier de la mise en œuvre des Conventions de Genève
de 1949 dans les conflits non internationaux sur le fondement de
leur article 1er commun. En effet, comme elle le fait
remarquer ce type de conflits est quantitativement beaucoup plus
répandu que les conflits internationaux classiques. L’auteur, selon
une méthode logique, mais qui surprendra peut-être les juristes
français, expose ses développements en quatre parties d’inégale
importance. La première, la plus longue, présente l’article 1er
et les problèmes généraux qu’il soulève. La seconde, la plus brève,
commente succinctement l’article 3 alors que la troisième,
essentielle dans l’optique de l’ouvrage, traite de l’applicabilité
de l’article commun à l’article 3. La quatrième partie, intitulée
« appréciation » contient en réalité les conclusions de la recherche
et comporte un certain nombre de pistes pour développer à l’avenir
la mise en œuvre de l’article 1er. C’est peut-être la
plus intéressante et la plus novatrice par les perspectives qu’elle
ouvre. L’auteur explore certaines pistes, notamment les obligations
qui peuvent découler pour les Etats de l’article 1er en
matière de commerce des armes classiques, ou à l’encontre des
acteurs privés (commerce des diamants par exemple) dans l’optique de
la prévention des conflits. D’autres développements possibles sont à
peine esquissés, notamment en matière pénale et l’on peut se
demander, comme nous l’avons suggéré, si on ne pourrait pas tirer de
l’article 1er l’obligation, ou du moins une habilitation,
en vue d’exercer une compétence universelle. Le livre de Birgit
Kessler offre en tout cas des éléments de réflexion, pour un débat
qui n’est pas de pure doctrine, mais intéresse les acteurs
humanitaires, comme en témoigne la série de réunions d’experts
organisée sur ce thème par le CICR durant l’année 2003.
Paul Tavernier
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