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Dernières notes de lecture et archives >>> |
Annuaire international des droits de l’Homme,
vol. I, 2006
Athènes/Bruxelles :
Ant. N. Sakkoulas/Bruylant, 705 p.
DECAUX (Emmanuel)
(sous la direction de)
Les Nations Unies et les droits de l’Homme. Enjeux
et défis d’une réforme
Paris : Pedone,
2006, 548 p.
FENET (Alain)
(sous la direction de)
Droit des relations extérieures de l’Union
européenne
Paris : Litec, 2006,
XVI-396 p.
PETTITI
(Christophe) et FAVREAU (Bertrand) (sous la direction de)
Handicap et protection du droit européen et
communautaire
Bruxelles : Bruylant,
2006, 181 p.
RINGELHEIM
(Julie)
Diversité culturelle et droits de l’Homme. La
protection des minorités par la Convention européenne des droits de
l’Homme
Bruxelles : Bruylant,
2006, XVIII+490 p.
KTISTAKIS
(Yannis)
La loi sacrée de l’Islam et les citoyens grecs
musulmans
Athènes/Thessalonique, Ed. Sakkloulas, 2006, 198 p.
[cette note de lecture figure également dans la
bibliographie "Islam et droits de
l'Homme"]
BOUCHET-SAULNIER
(Françoise)
Dictionnaire pratique du droit humanitaire
Paris : La
Découverte, 3ème édition 2006, 587 p.
BIAD (Abdelwahab)
Droit international humanitaire
Paris : Ellipses, 2ème
édition mise à jour, 2006, 139 p.
CURRAT (Philippe)
Les crimes contre l’humanité dans le Statut de la
Cour pénale internationale
Bruxelles/Paris/Genève : Bruylant/LGDJ/Schulthess, 2006, XIV+806 p.
GUILLARD (David)
Les armes de guerre et l’environnement naturel
Paris : L’Harmattan,
2006, 388 p., collection Logiques juridiques
PRIETO SANJUÁN (Rafael A.)
Internacionalización de conflictos internos y
responsabilidad individual
Medellin
(Colombie) : Biblioteca Juridica Diké, 2005, 619 p.
Corte suprema de
justicia de la nación República argentina
Investigación de derecho comparado
1/2 (2005) et 3
(2005)
Buenos-Aires : Corte
suprema de justicia de la Nación
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Annuaire international des droits de l’Homme,
vol. I, 2006
Athènes/Bruxelles :
Ant. N. Sakkoulas/Bruylant, 705 p. |
La parution d’une
nouvelle revue ou d’un nouvel annuaire est toujours un événement et
une aventure, en particulier lorsqu’il s’agit du domaine des droits
de l’Homme, comme nous l’avions déjà relevé en 1999 (Bulletin
d’information du CREDHO n° 9-1999, p. 72). On ne peut donc que
se féliciter de l’initiative de Petros Pararas, vice-président
émérite du Conseil d’Etat de Grèce et professeur de droit public,
mais aussi dynamique fondateur et directeur de la Revue
hellénique des droits de l’Homme, et de Pierre Lambert, avocat,
vice-président de l’Institut international des droits de l’Homme de
Strasbourg, fondateur et directeur, puis co-directeur de la Revue
trimestrielle des droits de l’Homme. A côté des revues
trimestrielles, ô combien indispensables et dont la régularité est
exemplaire, il y avait la place pour un Annuaire international
des droits de l’Homme en langue française qui obéit à un rythme
différent et laisse la place à une réflexion moins dominée par les
exigences de l’actualité. Par ailleurs, le développement de la
mondialisation et la suprématie croissante de la langue anglaise
commandait d’accueillir des contributions dans la langue de
Shakespeare, tout en préservant une place privilégiée pour celle de
Molière.
L’idée des
directeurs de cette nouvelle publication est de publier chaque année
les actes d’un colloque international qui se tient à Athènes autour
d’un thème général : le droit de l’Homme à un environnement sain en
2005, la démocratie en 2006, etc. Le sujet retenu pour le premier
colloque portait sur le droit de l’Homme à un environnement sain. Il
était parfaitement bien choisi car il préoccupe de plus en plus les
milieux scientifiques et académiques, mais aussi les simples
citoyens et il était intéressant de présenter une synthèse de la
matière. Celle-ci est ordonnée autour de trois axes : prolégomènes
et contexte international, approches transversales et expériences
nationales. Le premier axe, après les réflexions introductives
d’Emmanuel Roucounas et de Pierre Lambert, a permis de présenter à
la fois les aspects universels de la question (jurisprudence de la
Cour internationale de Justice, instruments des Nations Unies
relatifs aux droits de l’Homme, Protocole de Kyoto) et les aspects
régionaux (notamment européens avec l’action du Conseil de l’Europe
et de la Communauté, mais aussi le rôle de la Charte africaine des
droits de l’Homme et des peuples).
Le second axe a
donné l’occasion de vérifier la richesse du contenu du droit à un
environnement sain par rapport au droit à l’information, au respect
de la vie privée, au droit de propriété et aux libertés économiques,
à la mondialisation de l’économie, à la biodiversité. L’émergence
d’un droit à l’eau et les implications de la gouvernance
environnementale sont également exposées.
Quant au troisième
axe, il offre une vue comparatiste indispensable à toute
appréhension internationale des problèmes de la société
contemporaine dominée par la mondialisation de l’économie mais aussi
par la nécessité de réaffirmer l’universalité des droits de l’Homme,
ancrée dans les diversités nationales. Après une présentation
comparatiste du droit à un environnement sain dans les constitutions
européennes, de nombreux pays, principalement européens, sont passés
en revue : Royaume-Uni, Portugal, Allemagne, Canada, France, Suisse
et bien sûr Grèce (avec plusieurs contributions).
On trouve d’ailleurs
dans la partie « études » un article complémentaire de celui de
Bertrand Favreau sur le droit à l’eau. Celui-ci concerne les aspects
communautaires de la question et notamment la directive-cadre de
2000. On trouve également une étude sur la théorie de la justice et
les libertés de base selon J. Rawls.
Cette réflexion
théorique se poursuit à propos du principe de la confiance légitime
dans la rubrique « Jurisprudence » dans une note sous un arrêt du
Conseil d’Etat de Grèce. On lira également avec grand intérêt le
rapport sur la situation des droits fondamentaux en Grèce en 2005
présenté par Linos-Alexandre Sicilianos.
L’Annuaire est
complété par une substantielle rubrique bibliographique et un index
thématique. Il constitue d’ores et déjà un instrument de travail et
un outil de recherche indispensable, mais aussi un ouvrage de
réflexion qui devrait trouver très vite sa place dans toutes les
bonnes bibliothèques. On ne peut que souhaiter bon vent à ceux qui
ont porté l’idée et qui ont su la réaliser.
Paul TAVERNIER
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DECAUX (Emmanuel) (sous la direction de)
Les Nations
Unies et les droits de l’Homme. Enjeux et défis d’une réforme
Paris : Pedone,
2006, 548 p. |
Dans son message
d’ouverture, Michel Barnier, alors ministre français des Affaires
étrangères, affirmait que « les droits de l’Homme doivent être au
centre de la réforme des Nations Unies ». Emmanuel Decaux a eu le
grand mérite d’organiser les 30 septembre et 1er octobre
2004 le premier colloque international du CRDH de l’Université de
Paris II sur les enjeux et les défis de la réforme des Nations Unies
dans le domaine des droits de l’Homme.
L’ouvrage publié en
2006 constitue les actes de ce colloque et nous permet de juger de
la richesse des contributions. Grâce à la grande expérience des
enceintes qui s’occupent des droits de l’Homme au Conseil de
l’Europe, à l’OSCE et aux Nations Unies, Emmanuel Decaux a réuni des
personnes qui connaissent intimement les problèmes et ont eu une
action déterminante sur le plan de la diplomatie française ou en
tant qu’experts dans les organismes onusiens. Cela garantissait une
information de première main qui est ainsi mise à la disposition du
public et une réflexion de haut niveau. Il est impossible de rendre
compte en détail de la vingtaine d’études émanant de fonctionnaires
d’experts, de diplomates, d’universitaires et de militants des
droits de l’Homme. On ne peut qu’inciter tous ceux que préoccupe
l’avenir des droits de l’Homme à s’y reporter pour alimenter leur
réflexion.
Certes l’année 2005
n’a guère été favorable à la réforme des Nations Unies, ni en ce qui
concerne la lancinante question de la réforme du Conseil de
sécurité, ni pour ce qui est de la réforme du système onusien de
protection des droits de l’Homme. Le Conseil des droits de l’Homme
finalement créé en 2006 n’apporte guère de changements substantiels
et ne mettra pas fin à la politisation des droits de l’Homme, sans
doute inévitable. En revanche, la disparition de la sous-commission
qui a pourtant accompli un travail considérable, risque d’affaiblir
durablement l’efficacité de l’action des Nations Unies dans ce
domaine. L’ancien Secrétaire général des Nations Unies avait eu le
mérite d’ériger les droits de l’Homme en tant que troisième pilier
des Nations Unies, à côté de la sécurité et du développement. On
peut craindre qu’avec le nouveau Secrétaire général ce pilier ne
soit affaibli et le double veto américain et chinois à un projet de
résolution du Conseil de sécurité concernant le Myammar nous ramène
de manière inquiétante à l’époque révolue de la guerre froide.
Toutefois, la
lecture de l’ouvrage publié sous la direction d’Emmanuel Decaux,
nous permet, malgré les sources d’inquiétude, de relever aussi des
raisons d’espérer pour un progrès des droits de l’Homme ce que nous
souhaitons tous, car les droits de l’Homme sont un combat permanent.
Paul TAVERNIER
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FENET (Alain) (sous la direction de)
Droit des
relations extérieures de l’Union européenne
Paris : Litec, 2006,
XVI-396 p. |
Les relations
extérieures des Communautés européennes et de l’Union européenne se
sont considérablement développées et ont donné lieu à de nombreuses
études. Comme le souligne Alain Fenet dans l’introduction à ce
nouvel ouvrage, il s’agit de « combler une lacune dans l’édition
française » : entre les « travaux volumineux, savants et fouillés »
et les « études dispersées », il y avait place pour un manuel qui
donne « un aperçu d’ensemble de la matière » et « qui en livre
l’essentiel sous une forme accessible ». A cet égard l’ambition est
pleinement réalisée.
Alain Fenet a su
réunir une équipe (Jean-François Akandji-Kombé, Anne-Sophie Lamblin-Gourdin,
Eric Mondielli, Gwenaëlle Proutière-Maulion) et aboutir à une réelle
fusion des contributions qui sont individualisées, mais s’intègrent
parfaitement dans le plan d’ensemble, sans que l’on décèle des
ruptures de rythme. L’ouvrage est divisé en trois parties consacrées
à l’Union européenne en tant qu’entité nouvelle dans la société
internationale, à la Communauté européenne en tant que sujet de
droit international et en tant qu’acteur international.
Ceux qui
s’intéressent aux droits de l’Homme et à l’action humanitaire se
reporteront essentiellement à la troisième partie et notamment au
titre 4 consacré à la « dimension humaine », après l’économie,
l’environnement et la sécurité. Ce terme de « dimension humaine »,
emprunté au langage de la CSCE devenue OSCE, couvre non seulement
les droits de l’Homme et l’action humanitaire de l’Union européenne
(Eric Mondielli) mais aussi la politique migratoire (Jean-François
Akandji-Kombé). Si le premier volet de la dimension humaine des
politiques extérieures de l’Union européenne est relativement bien
connu, en revanche les deux autres volets le sont moins.
Bien que, en raison
des dimensions limitées de l’ouvrage, certaines questions soient
traitées de manière succincte, mais précise, on trouvera de
nombreuses analyses susceptibles de nourrir la réflexion et des
informations parfaitement à jour. On ne peut qu’approuver la formule
utilisée par Alain Fenet de « l’enrichissement du droit
communautaire par la CEDH » (p. 137), et la question de la mise en
œuvre des décisions du Conseil de sécurité est exposée dans ses
développements les plus récents (p. 123).
Les cinquante pages
consacrées à la dimension humaine de l’action extérieure de l’Union
européenne sont parfaitement bien venues et satisferont la curiosité
du lecteur. Elles retiendront particulièrement notre attention, mais
ne doivent pas nous conduire à négliger l’importance des
développements antérieurs, ce qui permet de prendre l’exacte mesure
de cette dimension, laquelle n’était guère présente à l’origine de
la construction européenne.
Paul TAVERNIER
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PETTITI (Christophe) et FAVREAU (Bertrand)
(sous la direction de)
Handicap et
protection du droit européen et communautaire
Bruxelles : Bruylant,
2006, 181 p. |
Cet ouvrage
constitue les actes du colloque organisé les 27 et 28 octobre 2005 à
Paris par l’Institut des droits de l’Homme des avocats européens (IDHAE)
en collaboration avec l’Institut des droits de l’Homme du Barreau de
Bordeaux. Comme le fait remarquer le juge Spielmann, dans
l’introduction, « la question a été trop peu étudiée ». Elle
intéresse d’ailleurs la communauté internationale dans son ensemble
puisque l’Assemblée générale des Nations Unies vient d’adopter le 13
décembre 2006, par consensus, une convention à ce sujet : Convention
pour la protection des personnes handicapées. Le projet,
malheureusement en anglais, figure d’ailleurs en annexe de
l’ouvrage. Toutefois, l’objet du colloque portait sur le droit
européen et le droit communautaire. Bertrand Favreau a montré avec
finesse et sensibilité que malgré le silence presque total de la
Convention européenne des droits de l’Homme sur le handicap, la
jurisprudence de la Cour est loin d’être négligeable. Les aspects du
droit communautaire sont exposés en détail (Frédérique Ast). Mais la
Charte sociale, trop souvent négligée, n’a pas été oubliée
(Christophe Pettiti).
Après cette première
partie européenne, la seconde partie présente un tableau comparatif
de diverses législations européennes : loi belge (Frédéric Krenc),
droit français (Philippe Froin), droit italien (Tommaso Caprioglio,
en italien), législation roumaine (Silvia Petrosel).
Ce livre permet une
fois de plus de constater l’intérêt d’une approche comparative pour
l’étude du droit européen, tant communautaire que strasbourgeois. Il
est par ailleurs complété par les discours prononcés à l’occasion de
la remise du prix Ludovic Trarieux à Henri Burin Desroziers. La
lecture de ce livre est stimulante pour tous ceux qui s’intéressent
aux droits de l’Homme et à la lutte contre différentes formes
d’exclusion.
Paul TAVERNIER
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RINGELHEIM (Julie)
Diversité
culturelle et droits de l’Homme. La protection des minorités par la
Convention européenne des droits de l’Homme
Bruxelles : Bruylant,
2006, XVIII+490 p. |
Issu d’une thèse de
doctorat soutenue en 2005 à l’Institut universitaire européen de
Florence et préfacé par Olivier De Schutter, cet ouvrage s’ouvre par
une substantielle introduction.
Le titre ne doit pas
induire le lecteur en erreur. La Convention européenne des droits de
l’Homme ne contient aucune disposition protégeant spécifiquement les
minorités religieuses, linguistiques nationales ou culturelles,
hormis l’article 14. C’est donc l’œuvre prétorienne de la Commission
et de la Cour qui est ici examinée avec la plus grande minutie.
Les deux premières
parties sont consacrées à la diversité culturelle confrontée
(confortée) au principe de liberté puis à celui d’égalité, sous la
forme de la non-discrimination. Quant à la troisième, la plus
originale selon le préfacier et co-directeur de thèse, elle met en
parallèle la diversité culturelle et la société démocratique,
dominée dans la jurisprudence de Strasbourg par le principe du
pluralisme. On suit avec intérêt les développements et les
démonstrations de l’auteur, appuyés non seulement sur des analyses
juridiques rigoureuses, mais aussi sur des connaissances
philosophiques et politiques très solides.
Il s’agit d’un beau
livre qui suscite la réflexion, ne serait-ce qu’en ce qui concerne
la question, soulevée par le préfacier, du droit des personnes
appartenant à une minorité de s’intégrer à la majorité, ce qui
toutefois pourrait conduire à terme à la disparition de la diversité
culturelle pourtant indispensable à nos sociétés et à la démocratie
pluraliste.
Paul TAVERNIER
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KTISTAKIS (Yannis)
La loi sacrée
de l’Islam et les citoyens grecs musulmans
Athènes/Thessalonique, Ed. Sakkloulas, 2006, 198 p. |
L’ouvrage de M.
Yannis Ktisatkis, intitulé en grec « Ιερός
νόμος του Ισλάμ και μουσουλμάνοι έλληνες πολίτες »
que l’on pourrait traduire en français par « La loi sacrée de
l’Islam et les citoyens grecs musulmans », est sorti en Grèce au
cours de l’année 2006 aux éditions juridiques grecques Sakkoulas et
devrait être prochainement traduit et édité en langue française.
Ce livre a la
particularité d’aborder un sujet pas ou peu connu, du moins par les
juristes français. En effet, M. Ktisakis traite dans ce livre de
l’application de la sharia vis-à-vis des citoyens de
nationalité grecque et de confession musulmane. A notre
connaissance, peu d’ouvrages parlent de cette situation d’un point
de vue juridique, la minorité musulmane de Grèce ayant fait l’objet
plutôt d’études sociologiques et historiques.
Le livre que nous
présentons ici a donc un intérêt à plusieurs titres. En effet, en
premier lieu, s’il semble s’inscrire dans un cadre purement interne,
à savoir, l’application ou non d’un droit spécifique à l’égard d’une
minorité donnée sur le territoire national grec, il peut en fait
être vu aussi comme un cas spécifique intéressant du point de vue du
droit international puisqu’il semblerait que ce soit la seule
application tolérée du droit musulman réglant les questions d’ordre
familial et d’héritage pouvant surgir entre coreligionnaires sur le
territoire européen. La Grèce, membre de l’Union européenne,
laisserait un ou des membres d’une minorité de nationalité grecque
mais de religion musulmane de régler tout litige, dirons-nous
personnel (droit de la famille : mariage, divorce…droit de
succession) avec une personne de religion musulmane selon les
dispositions religieuses de droit musulman. Il faut préciser que
l’exemple de l’île de Mayotte présente aussi cette caractéristique
mais l’auteur précise que l’application sur cette île tombe en
désuétude de même que dans le cas de Chypre qui avait des
dispositions de droit musulman à l’égard de la communauté turque
musulmane. Ainsi, la Sharia s’applique donc sur le territoire
national grec et donc sur une partie du territoire de l’Union
européenne.
Deuxièmement, cette
possibilité est laissée alors que la Grèce a, pour l’ensemble de ses
citoyens et ce quelque soit leur croyance, religion personnelle
(orthodoxe, musulmane, catholique, protestante….) un droit civil
propre (Code civil de 1946). Si la Grèce n’est pas un pays laïc,
elle n’applique pas non plus un droit religieux spécifique aux
orthodoxes qui constituent la majorité de sa population. Si les
mariages orthodoxes sont reconnus par les autorités publiques
grecques et que, selon le code civil lui-même le mariage peut-être
célébré religieusement par un prêtre de l’Eglise orthodoxe orientale
ou/et par un officiant d’un autre dogme ou/et religion reconnu par
la Grèce, le mariage civil a aussi fait son apparition et par,
ailleurs, à notre connaissance, le divorce et autres sujets de droit
de la famille et les questions d’héritage ont toujours été régis par
le droit civil grec et non selon le droit canonique orthodoxe grec.
Se pose alors la question de l’égalité du citoyen devant la loi,
puisque les citoyens grecs musulmans pourraient choisir entre le
droit civil grec et le droit musulman alors que les citoyens grecs
non musulmans ne pourraient se référer qu’à un seul type de droit.
Troisièmement, le
règlement de conflits et les décisions de droit musulman se fait par
le biais d’une institution musulmane appelée « Mufti » contrôlée par
le tribunal de première instance de la même circonscription. Mais là
encore, cette situation réserve encore une particularité puisqu’en
droit musulman le juge n’est pas le Mufti qui n’est que l’interprète
du droit musulman, mais le cadi. Jusqu’en 1913, nous dit l’auteur,
leurs deux rôles étaient séparés puis le Mufti s’est transformé en
juge religieux d’après la loi grecque 2345/1920. La Grèce a donc,
tout en voulant respecter le droit musulman et ses sujets, attribué
plus de compétences que n’en avait le Mufti originairement.
L’auteur a divisé
son Livre en trois chapitres à savoir l’applicabilité dans l’ordre
interne grec de la Sharia dans un premier chapitre, puis la
question de la mauvaise interprétation de l’obligation
internationale de la Grèce à l’égard de la minorité grecque et
enfin, les limites de cette applicabilité au regard de la protection
actuelle des droits de l’Homme.
Les bases juridiques
de droit grec dont est issue l’applicabilité sur le territoire grec
de la Sharia sont les lois n° 147/1914 « Περί
της εν ταις προσαρτωμέναις χώραις εφαρμοστέας νομοθεσίας και της
δικαστικής αυτών οργανώσεως »
qui concernaient, suite à l’agrandissement du territoire national
grec vers le Nord, les régions nouvellement intégrées qui
comportaient une forte population locale de confession musulmane
mais aussi apparemment de confession juive puisque cette loi
disposait que ces personnes en ce qui concerne le mariage et les
liens de parenté étaient soumises à la loi de leur religion. La Code
civil de 1946 n’abrogea pas cette disposition entièrement, elle ne
fut abrogée qu’à l’égard des Juifs par conséquent on peut penser
qu’elle est toujours en vigueur vis-à-vis des Musulmans puisque
l’article 6 de la loi introductive du nouveau code civil ne parle
que de l’abrogation de la loi vis-à-vis des Israélites. De plus,
l’article 8 de la loi introductive du code de procédure civile
conserve en vigueur l’article 10 de la loi 2345/1920 qui établit la
compétence du Mufti en tant que juge religieux. La loi 1920/1991
constitue avec la loi n°147/ 1914 les fondements juridiques de
l’application de la Sharia en Grèce.
En ce qui concerne
l’institution du Mufti, celui-ci est désigné par un décret
présidentiel après proposition du Ministre de l’Education nationale
et des Affaires religieuses. Pour être Mufti, il faut être musulman
de citoyenneté grecque, être diplômé de l’Ecole supérieure de
théologie islamique de Grèce ou/et de l’étranger ou/et avoir le
diplôme Itzmet Vamé ou/et avoir été Imam pendant au moins 10 ans et
se distinguer par sa morale et sa formation théologique. Les Muftis
sont donc des fonctionnaires de l’Etat grec et ils peuvent être
licenciés par un décret présidentiel.
Les trois tribunaux
religieux appelés aussi « Mufteia » concernés se situent en
Thrace occidentale dans les villes de Xanthi, de Komotini et de
Didymoticho (ici il y a une représentation du Mufti et non une
Mufteia). Ces trois tribunaux rendent leurs décisions en Ottoman,
décision qui peut être traduite en langue grecque par un
particulier, traduction qui doit être validé par le tribunal
religieux lui-même pour être ensuite présentée par les intéressés
aux autorités publiques grecques. En tous état de cause, les
décisions prises par les Muftis font automatiquement l’objet d’un
contrôle par le Tribunal d’Instance grec de la même circonscription
de la Mufteia qui examine l’applicabilité et donc nous
pouvons penser de la « validité », de la « légalité » de cette
décision. Si les circonscriptions de compétences sont délimitées (en
Thrace occidentale) se pose la question de savoir si les Muftis sont
compétents pour régler des questions soulevées entre Musulmans
d’autres régions de Grèce voire même ayant un élément d’extranéité
tel que la nationalité d’un autre pays. Si cette question semble
être réglée par les textes en pratique elle n’est pas si tranchée.
Ainsi, d’après la loi, seuls les Grecs musulmans de Thrace
occidentale qui n’ont pas été considérés comme échangeables (voir
sur ce point les échanges de population survenus entre la Grèce et
la Turquie, le fait aussi qu le Mufti ne peut agir que dans sa
juridiction donc là où il se trouve (loi 1920/1991) et pour
l’instant les trois tribunaux religieux sont en Thrace ) peuvent
saisir le Mufti et se voir appliquer la Sharia, les autres
musulmans habitant en dehors de la Thrace occidentale sont soumis
comme tous les autres citoyens de Grèce aux dispositions du Code
civil. Certaines affaires présentées par l’auteur montrent que cette
question n’est pas si tranchée et que les tribunaux religieux sont
compétents même à l’égard de citoyens grecs musulmans n’habitant
plus ou/et pas en Thrace occidentale De même, en ce qui concerne la
possession de la citoyenneté grecque par les parties musulmanes en
litige, c’est une condition sine qua non. Or, les tribunaux
religieux se jugent parfois compétents pour régler des affaires
concernant des musulmans étrangers ce qui est, en principe,
contraire à la loi 1920/1991.
En réalité, la
confusion aussi vient de ce que la compétence de célébrer le mariage
est donnée au Mufti en tant qu’homme d’Eglise et non en tant que
juge, la loi 1920/1991 n’est pas claire sur ce point. Or, en tant
qu’officiant religieux, le Mufti pourrait très bien en principe
marier deux personnes musulmanes sans considération de leur
nationalité mais en tant que juge religieux grec, il n’est pas
compétent pour les questions de mariage entre deux personnes
musulmanes non grecques. Dans les deux cas, un contrôle des
autorités grecques s’effectue mais par deux entités différentes et
au regard de deux textes juridiques différents (Code civil et
Constitution grecs). Le contrôle est donc confus et l’attitude des
tribunaux religieux aussi.
L’auteur précise
ensuite le contenu de la loi musulmane et comment il s’applique par
les tribunaux religieux. Ici nous parlerons que des points qui
différent grandement avec les différentes Lois occidentales à savoir
entre autres la polygamie et la décision unilatérale de l’époux de
divorcer de sa femme (sorte de répudiation). En ce qui concerne la
polygamie, là encore sous certaines conditions et avec autorisation
du Mufti, elle serait applicable mais elle serait
inconstitutionnelle. Dans la pratique, la polygamie diminue, le
Mufti posant souvent des obstacles.
En ce qui concerne
la dissolution du mariage sur la base de la seule volonté de
l’époux, là aussi la pratique est très rare. Dans ce cas et selon le
droit musulman, l’épouse reçoit une indemnisation prévue avant le
mariage. En ce qui concerne le mariage entre mineurs, l’autorisation
pour le mariage est donnée si la situation des mineurs semble
l’exiger (grossesse de la future épouse, réputation des familles,
etc.), l’auteur présente aussi les différents modes de dissolution
du mariage et leurs effets, les empêchements au mariage, les
questions de tutelle et d’héritage entre autres.
Nous venons de voir,
que l’application de la Sharia est contenue principalement
dans deux lois internes que sont la loi n°147/1914 et la loi
1920/1991. Existent-ils des dispositions d’ordre international
auxquelles la Grèce a contracté ? L’auteur explique que le traité de
Constantinople du 2/7/1881 et la loi d’application qui en découle
ΑΛΗ’/22.6.1882
« des chefs religieux des communautés de Mahométans » abordent pour
la première fois la question de l’application de la Loi sacrée et du
fonctionnement de tribunaux religieux spécifiques mais des régions
de Larissa, Pharphale, Tricala, Volos et non de Thrace. La Cour de
cassation considère que ce traité est encore en vigueur, le Conseil
d’Etat non, il aurait été abrogé par la loi 2345/1920.
Par la suite, le
Traité d’Athènes du 14 novembre 1913 « du renforcement de la paix et
de l’amitié entre la Grèce et la Turquie » mit fin à la guerre qui
opposait les deux pays et a sauvegardé la protection de la liberté
religieuse des Musulmans des nouveaux pays/territoires. Ce traité ne
concernait que les régions de Macédoine et de l’Epire. C’est dans la
suite de ce traité que les lois n° 147/1914 et 2345/1920 ont été
prises. Il est admis que le Traité d’Athènes n’est plus en vigueur
dans son ensemble. Le Conseil d’Etat en a décidé ainsi en regardant
ensuite l’évolution internationale qu’il y a eu, la Cour de
cassation, quant à elle, pense que ce traité est toujours la base
juridique de la protection de la minorité musulmane en Grèce et de
ce traité découle l’obligation internationale de la Grèce concernant
l’application de la Sharia.
Vient ensuite la
question du Traité de Sèvres, traité du 10 août 1920. Il devait
assurer un nouveau cadre général de protection des minorités qui
vivaient sur le territoire intérieur de la Grèce alors. De nouveaux
territoires sont encore attribués à la Grèce dont la Thrace.
L’octroi de celle-ci sera définitif lors de la Conférence de
Lausanne. Le traité ne fait pas référence à l’institution du Mufti,
il ne fait qu’une brève référence à la Loi sacrée. Pour le Conseil
d’ Etat grec ce traité est encore en vigueur et la Cour de cassation
grecque le mentionne comme un acte international qui impose
l’application de la Sharia. Nous ne rentrons pas ici dans la
question de savoir si le Traité de Sèvres est encore en vigueur,
avec la dissolution de la SDN, la seconde guerre mondiale, la
création de l’ONU, seuls, en droit international, à notre
connaissance le Traité de Lausanne de 1923 et le statut des îles
d’Åland de 1921 qui datent de l’époque de la SDN sont encore en
vigueur. Le Traité de Lausanne reprendrait donc le Traité de Sèvres
en ce qu’il fixe le régime juridique de protection des minorités non
musulmanes de Turquie et celle de la minorité musulmane en Grèce (en
Thrace).
Pour finir, dans sa
troisième et dernière partie, l’auteur aborde la question de la
compatibilité de la Sharia avec les traités internationaux
actuels et notamment la Convention européenne des droits de l’Homme
tant en ce qui concernerait le déroulement des actions judiciaires
des tribunaux religieux telle que l’audience et la comparution des
deux parties en cause devant eux (la comparution ne semble pas
toujours obligatoire en droit musulman, des décisions peuvent être
prises telles que par exemple lors de la dissolution du mariage par
simple déclaration de l’époux, sans que l’autre conjoint ait été
entendue et ne soit présente) qu’en ce qui concerne l’égalité des
sexes et la protection de l’enfant plus particulièrement.
Hélène APCHAIN
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BOUCHET-SAULNIER (Françoise)
Dictionnaire
pratique du droit humanitaire
Paris : La
Découverte, 3ème édition 2006, 587 p. |
Cette troisième
édition actualisée et enrichie du Dictionnaire pratique du droit
humanitaire témoigne du succès de cet ouvrage qui reste sans
équivalent et qui rend les plus grands services non seulement aux
militants et acteurs de l’humanitaire, mais aussi à tous ceux qui
sont intéressés et sensibles au droit humanitaire et à l’action
humanitaire. Cet ouvrage constitue un instrument très précieux pour
les praticiens et pour les universitaires. Il serait souhaitable que
ceux qui sont sur le terrain et ceux qui les conseillent ou les
aident, qu’ils soient juristes ou non, aient ce dictionnaire à leur
disposition pour trouver les réponses essentielles à leurs questions
et à leurs préoccupations afin de respecter et faire respecter les
normes internationales du droit humanitaire.
Paul TAVERNIER
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BIAD
(Abdelwahab)
Droit
international humanitaire
Paris : Ellipses, 2ème
édition mise à jour, 2006, 139 p. |
Cette deuxième
édition qui est publiée près de sept ans après la première (compte
rendu dans le Bulletin d’information du CREDHO, n° 9/1999, p.
72) était nécessaire, étant donné les développements intervenus en
la matière. Le volume a pris un peu plus d’ampleur, passant de 122 à
139 pages. Toutefois, l’auteur a conservé le format restreint, ce
qui lui impose un effort considérable de concision, mais donne
cependant plus de force encore à l’exposé des problèmes et lui
permet néanmoins de satisfaire la curiosité des lecteurs. Abdelwahab
Biad prend soin de préciser dans une note liminaire les points
essentiels sur lesquels portent les nouveaux développements :
Protocole additionnel III (2005) aux Conventions de Genève sur le
nouvel emblème protecteur ; terrorisme et situation des personnes
capturées dans le cadre de la lutte anti-terroriste (détenus de
Guantanamo) ; la responsabilité de protéger ; les tribunaux spéciaux
pour la Sierra Leone, le Timor oriental et le Cambodge. Il indique
également les questions qui ont fait l’objet d’une actualisation :
la coutume et l’étude du CICR publiée en 2005, le renforcement de la
protection des victimes des conflits armés non internationaux
découlant de la jurisprudence des tribunaux pénaux internationaux,
le développement des notions de crimes contre l’humanité et crimes
de guerre du fait de la jurisprudence des juridictions
internationales et l’activité des deux tribunaux ad hoc et de
la Cour pénale qui commence à fonctionner.
C’est dire que
l’ouvrage est parfaitement à jour des développements et des débats
les plus récents. C’est un tour de force d’avoir réuni autant
d’informations sous un si petit volume et de les avoir présentées
sous une forme accessible et facile à lire. On notera également que
la présentation de la bibliographie a été améliorée et que son
contenu a également été actualisé ; elle n’a évidemment pas la
présentation d’être exhaustive, mais elle permettra néanmoins aux
personnes intéressées de poursuivre plus loin leur quête des règles
essentielles de ce droit humanitaire dont la nécessité est toujours
d’actualité, car il y a toujours, et pour longtemps encore, des
conflits et des situations intolérables où il doit s’appliquer.
Paul TAVERNIER
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CURRAT (Philippe)
Les crimes
contre l’humanité dans le Statut de la Cour pénale internationale
Bruxelles/Paris/Genève : Bruylant/LGDJ/Schulthess, 2006, XIV+806 p. |
Cet ouvrage
monumental et très dense est une thèse de doctorat soutenue à
l’Université de Genève. Certes la littérature, y compris en langue
française, concernant les crimes contre l’humanité est abondante
mais l’auteur se concentre sur les dispositions du Statut de la Cour
pénale internationale et présente à cet égard une somme qui n’a pas
d’équivalent jusqu’à présent.
Les développements
comprennent après une introduction, un chapitre premier consacré à
l’évolution historique de la notion de crimes contre l’humanité et à
l’histoire de la création de la Cour pénale internationale. La
première partie traite en détail (14 chapitres) les éléments
constitutifs des crimes contre l’humanité dans le Statut de Rome
alors que la seconde partie étudie la responsabilité pénale pour
crime contre l’humanité telle qu’elle est organisée dans le Statut
(responsabilité de l’individu, des chefs militaires, des supérieurs
hiérarchiques, de l’exécutant et des motifs d’exonération de la
responsabilité pénale.
Bien que Philippe
Currat insiste sur son intention de limiter ses analyses au Statut
de Rome : « Les crimes contre l’humanité dans le Statut de la Cour
pénale internationale sont le seul objet de notre attention »,
dit-il (p. 17). Il affirme même : « C’est ainsi que nous
n’aborderons pas de manière générale, ni le droit international ni
le droit pénal, ni même les crimes contre l’humanité, tels que la
notion globale peut en être discernée, aujourd’hui, du droit
international général ou coutumier » (ibid.). Mais en réalité
il connaît parfaitement ces aspects connexes et il y fait
constamment référence, bien qu’à regret semble-t-il. L’auteur
revient sur cette volonté de proclamer l’autonomie et le caractère
auto-suffisant du Statut de Rome « perçu comme un tout cohérent qui,
interprété correctement, offre des réponses complètes et pertinentes
qui lui sont propres » (p. 750). Certes Philippe Currat a raison de
souligner l’apport considérable du Statut adopté en 1998 par rapport
à la situation antérieure lorsqu’il affirme : « Nous avons démontré
que la réglementation du Statut est en bien des points différente du
droit international général ou coutumier et qu’il convient donc de
se départir de réflexes acquis jusqu’à présent des travaux des deux
tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda,
lorsque l’exige le Statut de Rome ». Il ajoute même : « En ce sens,
une grande part de la doctrine et de la jurisprudence antérieures au
Statut de la Cour pénale internationale peut être considérée comme
dépassée » (p. 750).
Cette position a le
mérite de la clarté et confère aux développements de la thèse une
grande force de conviction. Elle nous paraît cependant excessive et
ne pas refléter la majorité de la doctrine. En effet, si chaque
juridiction tend à juste titre à défendre jalousement son autonomie,
on constate en revanche qu’elle a tendance à utiliser très largement
l’expérience de ses devancières et, à cet égard, celle du TPIY et du
TPIR a déjà été très largement intégrée dans les dispositions du
Statut de la CPI et lui sera certainement encore très utile dans
l’avenir pour développer sa propre jurisprudence.
Cela n’ôte rien à
l’intérêt de la lecture de la thèse de Philippe Currat dont la
valeur scientifique est irréprochable, bien qu’on puisse regretter
que ses références de bas de pages soient essentiellement en langue
anglaise, alors que la bibliographie générale est à la fois en
langue française et anglaise. On soulignera aussi le caractère
extrêmement détaillé des index (thématique, des textes et
conventions citées et de la jurisprudence citée, étant entendu que
cette « jurisprudence » comprend aussi des textes émanant d’organes
non juridictionnels ou quasi juridictionnels). Telle qu’elle se
présente la thèse de Philippe Currat est une œuvre qui honore la
littérature juridique de langue française.
Paul TAVERNIER
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GUILLARD (David)
Les armes de
guerre et l’environnement naturel
Paris : L’Harmattan,
2006, 388 p., collection Logiques juridiques |
L’ouvrage de Ph.
Guillard produit d’une thèse soutenue par l’auteur à l’Université de
Rouen est intéressant d’un double point de vue : son actualité et
les questions juridiques qu’il soulève. Il intervient après celui de
Karine Mollard-Bannelier (La
protection de l’environnement en temps de conflit armé,
Paris : Pedone, 2001, 542 p.)
publié il ‘y’a quelques années. L’ouvrage est structuré en deux
parties qui portent respectivement sur les règles protégeant
l’environnement contre l’utilisation d’armes ou méthodes de guerre
« écocides » (pp. 21-208), et sur la responsabilité en cas
d’atteintes à l’environnement du fait d’une telle utilisation (pp.
209-358).
L’auteur dresse dans
une première partie, le cadre de son sujet en recensant les règles
applicables du droit international de l’environnement, du droit
international humanitaire et du droit du désarmement et de la
maîtrise des armements. La problématique des armes de guerre et de
l’environnement prend une place particulière dans le jus in bello
et ses déclinaisons (droit de La Haye et droit de Genève) rappelés
par l’auteur, déclinaisons dont la pertinence est de plus en plus
contestée aujourd’hui. L’interdiction d’utiliser des méthodes et
moyens de guerre ayant pour effet de nuire gravement à
l’environnement est une règle essentielle du droit international
humanitaire et son respect relève du principe de précaution comme en
découle une lecture stricte des articles 53, 54 et 56 du Protocole
I. Le droit en la matière repose également sur la Convention ENMOD
de 1986 (Convention sur
l’interdiction d’utiliser des techniques de modification de
l’environnement à des fins militaires ou toutes autres fins hostiles),
mais, en gardant à l’esprit que cette dernière ayant un caractère
préventif, ne répond que partiellement au défi posé par les
atteintes à l’environnement en temps de guerre. On remarquera
quelques développements intéressants sur le « terrorisme écocide »
ou sur l’arme nucléaire, mais l’auteur a parfois tendance à se
disperser lorsqu’il s’attarde sur des aspects de jus ad bellum
(légitime défense préventive).
Il aborde dans une
deuxième partie le problème de la responsabilité des États, des
organisations intergouvernementales et des individus pour atteinte à
l’environnement, ce qui l’amène à aborder incidemment des aspects de
droit interne. Cette partie illustre si besoin est la complexité du
problème de la mise en œuvre, de la prévention et de la répression
des atteintes à l’environnement par fait de guerre. Le récent avis
de la CIJ sur les activités armés au Congo (RDC c. Ouganda)
du 19 décembre 2005 et en particulier ses dispositions relatives à
la responsabilité auraient pu fournir matière à réflexion. Mais il
est vrai que cet arrêt est arrivé alors que l’ouvrage était sous
presse. L’auteur n’est pas avare de propositions plus ou moins
réalistes telles que l’institution d’un Comité de surveillance au
dessus du Conseil de sécurité, d’un « Code d’éthique des
scientifiques militaires, d’un « Public trust » au profit des
générations futures, ou d’une « Cour mondiale de l’environnement ».
Mais, dans l’ensemble on doit saluer un travail de recherche
consistant et bien documenté.
Abdelwahab BIAD
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PRIETO SANJUÁN (Rafael A.)
Internacionalización de conflictos internos y responsabilidad
individual
Medellin
(Colombie) : Biblioteca Juridica Diké, 2005, 619 p. |
Pireto
Sanjuán avait soutenu en 2000 une thèse de doctorat à l’Université
de Paris II, sous la direction de Pierre-Marie Dupuy, sur le sujet
suivant : « Contribution à l’étude de la responsabilité
internationale des entités non étatiques participant à un conflit
armé non international ».
Il est maintenant
professeur de droit international public et de relations
internationales à la Faculté des Sciences juridiques de l’Université
Pontificale Javeriana et il manifeste par cette nouvelle publication
son intérêt particulier pour le droit humanitaire. Il s’agit du
premier volume d’une série consacrée aux Grands arrêts de la justice
pénale internationale. Le choix de l’affaire Tadic était
judicieux car il marque une étape essentielle dans l’évolution du
droit humanitaire et du rapprochement des règles applicables aux
conflits internationaux et non internationaux.
L’ouvrage est
destiné à un public de langue espagnole et notamment
latino-américain, qui n’est pas forcément familier de cette
jurisprudence. Il comprend une présentation générale de l’affaire, y
compris du contexte général des conflits yougoslaves ainsi que de
l’apport de la jurisprudence Tadic en ce qui concerne la
compétence du tribunal et la responsabilité pénale individuelle.
Outre cette présentation, l’essentiel de l’ouvrage est constitué par
la traduction en langue espagnole des décisions du Tribunal
(décision du 2 octobre 1995 relative à l’appel de la défense
concernant l’exception préjudicielle d’incompétence, arrêts du 7 mai
1997 et du 15 juillet 1999, en première instance et en appel). Il
est complété par des annexes (fiche de jurisprudence, texte du
Statut du TPIY, etc.).
L’ouvrage a donc une
destination essentiellement pratique.
Paul TAVERNIER
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Corte suprema de justicia de la nación República argentina
Investigación
de derecho comparado
1/2 (2005) et 3
(2005)
Buenos-Aires : Corte
suprema de justicia de la Nación |
Les deux derniers
volumes de cette revue publiée par la Cour suprême de Justice de la
nation de la République d’Argentine contiennent comme les précédents
une partie « Jurisprudence » consacrée à la jurisprudence des
tribunaux internes et internationaux (notamment Cour européenne des
droits de l’Homme). La partie « doctrine » recense et analyse des
articles parus dans diverses revues et publications en espagnol,
italien, français, anglais, notamment sur des questions intéressant
les droits fondamentaux. On trouve également une partie « études »
qui contient un ou deux articles de doctrine selon les numéros,
ainsi qu’une partie textes commentés et une autre de documents, une
partie « notices (informations brèves) et une substantielle rubrique
bibliographique qui recense les ouvrages récents et les articles de
revues dans les principales langues internationales (espagnol,
anglais, français). Chaque numéro est complété par un index.
Cette publication
qui paraît depuis plusieurs années est consacrée au droit
constitutionnel comparé et aux libertés fondamentales. Elle fournit
de nombreuses informations et constitue un instrument de travail
extrêmement utile pour les hispanophones… et pour les autres.
Paul TAVERNIER
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